Mourir comme un homme (2009), João Pedro Rodrigues

Publié le par Diana

Mourir comme un homme (2009), João Pedro Rodrigues

Sélection officielle d’Un Certain Regard lors du Festival de Cannes 2009, Mourir comme un Homme / Morrer como um Homem (2009) de João Pedro Rodrigues met en scène Tonia, un(e) transsexuel(le) qui gagne sa vie avec les spectacles de travestis à Lisbonne. Tonia voit sa vie basculer le jour où son statut de star est menacé par la jeune concurrence, que son jeune petit ami, Rosário drogué notoire la presse pour qu’il (elle) change de sexe et le retour d’un fils (déserteur de l’armée) qui ne l’accepte pas tel quel(le)…

Une longue scène introductive nous plonge dans la pénombre où s’élèvent silhouettes et chuchotements d’hommes… jusqu’au drame. Un acte instinctif, conséquence d’un malaise enfoui et refoulé. Le prélude, plein de symbole, est posé, annonçant le déroulement d’un film riche en enseignement.

Si Tonia est ce corps d’homme dans un esprit de femme, Mourir comme un homme ne s’en fait pas un cas d’étude. João Pedro Rodrigues choisit cet homme comme il aurait pu choisir une femme. Ce qui importe dans la démarche est de montrer le mal être qui réside au fond de cet homme, au-delà même de celui qui pourrait découler de sa transformation physique. Car Tonia s’assume dans sa complexité. Son esprit malade, elle le doit à une peur panique de la solitude. Alors pour se guérir de ce mal, elle posera son dévolu sur Rosário, un jeune homme, drogué et instable, qui parviendra malgré une relation conflictuelle à insuffler l’affection dont elle a besoin. Avec patience, João Pedro Rodrigues tisse et amène la compréhension nécessaire à l’adhésion d’une relation ardue. On perçoit progressivement la nécessité de Tonia pour Rosário, une nécessité de l’ordre de l’affection ou de la maternité. Dans la confusion, difficile de savoir s’il est question de maternité saine ou enfouie, né d’une paternité ratée.

La beauté de Mourir comme un homme réside dans la fragilité masquée de ce personnage. Tentant de donner le « La » dans le cabaret dans lequel elle travaille, mais s’avérant être une âme perdue en dehors de cet univers : coups de blues, obsessions furtives et brutales… Tel un enfant, Tonia est animé par une instabilité, voir une hyperactivité qui l’a pousse sans cesse à se remettre en question dans le mal comme dans le bien. Cet esprit malade, João Pedro Rodrigues l’instaure dans la continuité d’un corps abîmé qui rejetterait les impuretés qui pourraient voir naître une vie meilleure. Mourir comme un homme est une ode humaniste, profonde et poignante. Il existe des films dont la teneur pourrait être proche de celle de Rodrigues, pourtant sa saveur persistante atteste d’un propos engagée qui mène à une dimension unique.

Rodrigues n’est pas ici simple narrateur et réalise avec goût des plans étonnants, quasi-expérimentaux. Ces essais de saturation, appellent les instants qu’il souhaite immortaliser. Il déverse alors sur ces décors, du rouge ou du bleu, unifiant son image d’une seule et unique couleur, l’imprégnant d’une musique d’une intensité incroyable. Il y a de la fougue dans ce Rodrigues. Il y a du génie dans cette fresque audacieuse mais humble. Rodrigues se livre à corps perdue dans un essai intimiste. Un besoin viscéral peut-être…

Diana

Portugal/France – 2h13 – couleur – 35mm – 1,33 – Dolby SRD

 

FICHE ARTISTIQUE

 

Tonia FERNANDO SANTOS – Rosário ALEXANDER DAVID – Maria Bakker GONÇALO FERREIRA DE ALMEIDA – Zé Maria CHANDRA MALATITCH – Jenny JENNY LARRUE – Irene CINDY SCRASH – Teixeira FERNANDO GOMES – Paula MIGUEL LOUREIRO – Dr. Felgueiras ANDRÉ MURRAÇAS

FICHE TECHNIQUE

 

Réalisation JOÃO PEDRO RODRIGUES – Scénario JOÃO PEDRO RODRIGUES, RUI CATALÃO – Collaboration JOÃO RUI GUERRA DA MATA – Image RUI POÇAS (AIP) – Son NUNO CARVALHO – Montage  RUI MOURÃO, JOÃO PEDRO RODRIGUES – Mixage JEAN-PIERRE LAFORCE – Direction artistique JOÃO RUI GUERRA DA MATA – Décoration FERNANDO AREAL – Costumes PATRÍCIA DÓRIA – Maquillage SANDRA PINTO – Directrice de production BEATRIZ JARMELA – Producteurs associés ALEXANDRA HENOCHSBERG, ARTHUR HALLEREAU, GREGORY GAJOS – Co-productrice JUDITH NORA (AD VITAM) – Productrice MARIA JOÃO SIGALHO (ROSA FILMES) – Production ROSA FILMES, AD VITAM – Distribution EPICENTRE FILMS – Avec le soutien de L’ACID et du GNCR

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